Cet article a été écrit en réaction à cet article de la presse: "Hausse des droits de scolarité: profitable pour les moins nantis".

Mise à jour: l'IRIS a publié des commentaires fort intéressants sur cette analyse.

Dans cet article, on fait un calcul où on montre que la nouvelle proposition du gouvernement Charest va être en fait favorable aux moins nantis de la société. Si la section de la "Praisse" ne vous a pas déjà indiqué un problème argumentaire, je vous invite à suivre mes réflexions, qui montreront sans équivoque les sophismes de ces arguments.

Tout d'abord, il faut comprendre notre histoire. Un récapitulatif s'impose:

  1. En 1996, le PQ (Pauline Marois comme ministre de l'éducation, vous vous souvenez?) propose un dégel des frais de scolarité, une coupure de 700M$ suivant une coupure déjà établie de 400M$. La grève, relativement courte, la fait battre en retraite, mais les coupures de 400M$ demeure, la cote R est établie, les prêts et bourses modifiés, et la taxe à l'échec s'installe.

  2. le PLQ a été élu en 2003 avec comme promesse de garder le gel des frais de scolarité

  3. en 2005, ils ont pourtant coupé les bourses en convertissant 103M$ de bourses en prêts, la grève étudiante massive de cette année les fait reculer le gouvernement, qui réinjecte les 103M$ en 2006, mais pas avant d'avoir transformé 70M$ de bourses en prêts

  4. en 2007, les libéraux changent d'idée (!) et sont ré-élus en promettant un dégel des frais, avec une augmentation de 30% (50$/session pendant 5 ans, donc 500$), qui est mise en place après leur élection, avec une opposition limitée des mouvements étudiants, épuisés par la grève précédente

  5. en 2012, les libéraux proposent finalement un budget avec une augmentation de 75% sur 5 ans (le fameux 1625$), en plus de l'augmentation de 2007

  6. après 10 semaines de grève étudiante, les libéraux "concèdent" un étalement de l'augmentation sur 7 ans, mais une augmentation de 80% (1778$)

Pour faire passer cette dernière pilule, Charest ajoute dans la sauce qu'il "bonifie" le régime des bourses alors qu'il a été déjà sabordé par le parti libéral en 2005 et par le PQ en 1996.

Par ce sacrifice de la prochaine génération, le gouvernement Libéral espère récupérer 332M$ par an. Mais on se doit de comparer ceci avec le Plan Nord du gouvernement Charest, qui prévoit un investissement publics et privés de 80G$ (milliards!) sur 25 ans, soit un estimé de 338M$ par an pour le public. Notons aussi le financement (public) de la construction de l’amphithéâtre de Québec (privé!) pour 266M$.

Donc, le fond de cette histoire est que le gouvernement joue avec les chiffres et, particulièrement avec l'opinion publique, en changeant des chiffres de colonnes, mais sans montrer clairement le total.

Le total est que de plus en plus, on reçoit des prêts, et moins de bourses. Les frais de scolarité augmentent, sous prétexte que les "étudiants doivent faire leur part", qu'on devrait rephraser comme "les étudiants, classe sociale parmis les plus défavorisée et exclue de la société, doit faire sa part".

Dans l'article de la Presse, on indique qu'une famille ayant un revenu de 45 000$ ou moins pourra bénéficier de 5000$ de bourses dans l'année, par étudiant. On indique ensuite que c'est à 65 000$ par an que les familles sont "ni gagnantes ni perdantes" de la réforme. On note ensuite que les familles ayant 72 000$ de revenus et plus vont en sortir perdant à cause des baisses des crédits d'impôts.

Ce qu'on ne dit pas dans l'article, c'est qu'au final, c'est la classe moyenne qui écope: entre 45 et 72k$, on parle même de la "classe moyenne pauvre", généralement, surtout si on pense au salaire individuel: 22 à 36K$ par an, ou autrement dit 9 à 15$/hre pour du travail temps plein, soit un salaire à peine au dessus du salaire minimum. Et je sais pas pour vous, mais personnellement, on ne va pas loin avec 22 000$ par an, particulièrement avec les loyers, les frais de santé et autres charges qui augmentent.

Au final, on fait un trou dans la classe moyenne. Je n'aurais pas été à l'université avec une telle augmentation, ou du moins, ma famille serait passée de la classe moyenne à la classe pauvre pour faire ce sacrifice.

C'est toujours la même vieille recette. Les riches s'enrichissent, les pauvres s'appauvrissent. On socialise les coûts et privatise les bénéfices. Un transfer de richesses, que les riches espère se faire en douceur, du bien commun vers le privé. Le changement d'une société solidaire vers une société individualiste et injuste.

Le hic, c'est que le mouvement étudiant était prêt, cette fois-ci, et ne laissera pas passer cette réforme néolibérale sous silence. Toute une génération se lève et dit non à l'individualisme à outrance et réclame clairement un investissement progressif dans notre société.

En espérant vous voir lors de la manifestation du 1er mai à 16h30 au Champ de Mars, sinon à la 7e marche nocturne étudiante.

En marche vers la victoire!

Note sur les sources: j'ai trouvé peu d'information sur internet sur les grèves et réformes étudiantes passées, particulièrement sur la grève à laquelle j'ai participé comme étudiant, à l'inverse de la grève actuelle et celle de 2005, auxquelles je participe comme travailleur solidaire. On peut cependant reconstruire des bouts d'histoire avec les pages suivantes.

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